FERDRUPT - SOUVENIR DE LUCIE CREUSOT VVE PAUL JOLY
FOREST :: VALLEE DE LA HAUTE MOSELLE, Rupt sur Moselle à Bussang :: "Recueil de témoignages sur le vécu sous la botte Allemande ( 39-45)
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FERDRUPT - SOUVENIR DE LUCIE CREUSOT VVE PAUL JOLY
Je suis née dans une ferme, en dessous de la carrière de Remanvillers à Ramonchamp. A l’époque, cette rue n'avait pas de nom. (La Rue des Planesses maintenant – Ndr), elle faisait la limite entre Ferdrupt et Ramonchamp. Je me trouvais toujours là lorsque la guerre a été déclarée. Mes parents avaient quelques bêtes, moi je travaillais chez Witt & Felts, les industriels de Ferdrupt qui avaient également le petit tissage en montant la carrière de Remanvillers, chez Cotonboule maintenant.
Deux de mes frères ont été mobilisés, Henri a été fait prisonnier tandis que Camille a pu passer en zone libre.
En juin 1940, les ponts ont sauté, nous avions été prévenus par le garde champêtre qu'il fallait aller se réfugier plus haut dans la colline. Papa a attelé les vaches et nous sommes montés avec quelques affaires chez un de nos oncles, Emile Marquis. C'est dans l'écurie de cette ferme, où nous étions tous réfugiés que nous avons vu nos premiers Allemands. Ils sont venus nous braquer avec leurs lampes, je vous assure que ça fait un drôle d'effet. On a tous pensé qu'on allait se faire embarquer. Brigitte et André Galmiche ainsi que leurs parents se trouvaient là-haut avec nous.
Nous sommes redescendus chez nous quelques jours plus tard lorsque tout est redevenu calme.
Deux autres de mes frères, Maurice et Marcel, plus jeunes, avaient fui en zone libre. Ils se sont retrouvés dans le Jura.
Les cartes d'alimentation ont été mises en place, j'étais J.3, c'est à dire que ma ration était plus conséquente que celle d'un adulte. De 15 à 18 ans c'était J.3. On n'avait pas de la viande à volonté comme maintenant. Le couvre-feu a été mis en place ce qui fait qu'on ne pouvait plus sortir de chez soi le soir.
En 1942, nous avons appris qu'Henri venait d'être tué en Allemagne. Nous n’avons récupéré son corps qu’en 1951.
Camille, Maurice et Marcel sont revenus mais ont à leur tour été réquisitionnés par le STO et se sont retrouvés en Allemagne. Camille, qui était marié, a profité d'une permission pour ne pas repartir. Lorsque Marcel est revenu à son tour à la maison, en 1943, il a voulu faire comme son frère, mais c'était sans compter sur des gens qui n'avaient que ça à faire que de raconter ce qui se passait. Un jour, nous étions tous à table, quelqu'un a frappé. D'habitude maman disait « entrez », mais ce jour-là elle est allée à la porte. On l'a attendu dire « Bonjour messieurs ». On a tout de suite compris que c'était les gendarmes. Camille, qui était là, s'est enfui par l'autre bout de la maison.
Les gendarmes sont revenus les chercher plusieurs fois. Ils leur ont intimé l'ordre de se trouver à la gare un lendemain matin et qu'à défaut ils viendraient les chercher avec un fusil.
Fin 1942, comme tous les hommes étaient partis, l'usine de Remanvillers a fermé et je devais aller au travail à Ferdrupt. Je faisais les trajets à vélo. Régulièrement je me faisais arrêter par les Allemands qui contrôlaient mon laissez-passer.
En 1944 se sont déroulés les pires moments que nous avons vécus. Les bombardements ont duré des jours et des jours. Combien de soldats ont été tués dans le près en dessous de chez nous.
Les jours se succédant, nous commencions presque à ne plus faire attention aux explosions. Rien qu'au bruit, nous savions si c'était un départ de tir ou si l'obus arrivait au point de chute.
Je me souviens d'un jour où j'étais moins pressée que d'habitude, j'ai pris mon temps pour aller m'abriter dans la grange. J'ai senti quelque chose dans mon dos. Lorsque l'alerte a été terminée je suis allée voir maman pour qu'elle me regarde. Un éclat d'obus m'avait touché le bas du dos.
Je peux vous assurer qu'après ça, je ne traînais plus dans le champ.
Début octobre 44, les Tabors ont eu leur Poste de Commandement dans une pièce de notre maison, les soldats dormaient sur le foin dans notre grenier. Ils montaient au front, sur Morbieux depuis chez nous.
Nous sommes alors remontés chez notre oncle, Emile Marquis à la colline de Remanvillers. A nouveau nous avons vécu dans l'écurie de cette ferme avec les Galmiche et Marthe Creusot ma marraine.
Un jour, en 1945, j’étais allée à Saulxures à vélo avec mon frère Marcel. Nous avions un petit cousin qui habitait là-bas et qui s’était retrouvé en Allemagne avec Henri. Nous voulions récupérer auprès de lui des renseignements sur les circonstances de la disparition de notre frère.
En cours de route, nous avons été contrôlés au Ménil par les gendarmes qui nous ont demandé nos papiers. Marcel n’en avait pas et le gendarme lui a demandé les raisons pour lesquels il était sans papier. Marcel lui a répondu que s’il voulait ses papiers, il n’avait qu’à aller les chercher en Allemagne où il l’avait envoyé deux ans plus tôt.
Il s’agissait d’un des gendarmes qui étaient venus le chercher plusieurs fois chez nous auparavant.
Heureusement, les choses en sont restées là.
Deux de mes frères ont été mobilisés, Henri a été fait prisonnier tandis que Camille a pu passer en zone libre.
En juin 1940, les ponts ont sauté, nous avions été prévenus par le garde champêtre qu'il fallait aller se réfugier plus haut dans la colline. Papa a attelé les vaches et nous sommes montés avec quelques affaires chez un de nos oncles, Emile Marquis. C'est dans l'écurie de cette ferme, où nous étions tous réfugiés que nous avons vu nos premiers Allemands. Ils sont venus nous braquer avec leurs lampes, je vous assure que ça fait un drôle d'effet. On a tous pensé qu'on allait se faire embarquer. Brigitte et André Galmiche ainsi que leurs parents se trouvaient là-haut avec nous.
Nous sommes redescendus chez nous quelques jours plus tard lorsque tout est redevenu calme.
Deux autres de mes frères, Maurice et Marcel, plus jeunes, avaient fui en zone libre. Ils se sont retrouvés dans le Jura.
Les cartes d'alimentation ont été mises en place, j'étais J.3, c'est à dire que ma ration était plus conséquente que celle d'un adulte. De 15 à 18 ans c'était J.3. On n'avait pas de la viande à volonté comme maintenant. Le couvre-feu a été mis en place ce qui fait qu'on ne pouvait plus sortir de chez soi le soir.
En 1942, nous avons appris qu'Henri venait d'être tué en Allemagne. Nous n’avons récupéré son corps qu’en 1951.
Camille, Maurice et Marcel sont revenus mais ont à leur tour été réquisitionnés par le STO et se sont retrouvés en Allemagne. Camille, qui était marié, a profité d'une permission pour ne pas repartir. Lorsque Marcel est revenu à son tour à la maison, en 1943, il a voulu faire comme son frère, mais c'était sans compter sur des gens qui n'avaient que ça à faire que de raconter ce qui se passait. Un jour, nous étions tous à table, quelqu'un a frappé. D'habitude maman disait « entrez », mais ce jour-là elle est allée à la porte. On l'a attendu dire « Bonjour messieurs ». On a tout de suite compris que c'était les gendarmes. Camille, qui était là, s'est enfui par l'autre bout de la maison.
Les gendarmes sont revenus les chercher plusieurs fois. Ils leur ont intimé l'ordre de se trouver à la gare un lendemain matin et qu'à défaut ils viendraient les chercher avec un fusil.
Fin 1942, comme tous les hommes étaient partis, l'usine de Remanvillers a fermé et je devais aller au travail à Ferdrupt. Je faisais les trajets à vélo. Régulièrement je me faisais arrêter par les Allemands qui contrôlaient mon laissez-passer.
En 1944 se sont déroulés les pires moments que nous avons vécus. Les bombardements ont duré des jours et des jours. Combien de soldats ont été tués dans le près en dessous de chez nous.
Les jours se succédant, nous commencions presque à ne plus faire attention aux explosions. Rien qu'au bruit, nous savions si c'était un départ de tir ou si l'obus arrivait au point de chute.
Je me souviens d'un jour où j'étais moins pressée que d'habitude, j'ai pris mon temps pour aller m'abriter dans la grange. J'ai senti quelque chose dans mon dos. Lorsque l'alerte a été terminée je suis allée voir maman pour qu'elle me regarde. Un éclat d'obus m'avait touché le bas du dos.
Je peux vous assurer qu'après ça, je ne traînais plus dans le champ.
Début octobre 44, les Tabors ont eu leur Poste de Commandement dans une pièce de notre maison, les soldats dormaient sur le foin dans notre grenier. Ils montaient au front, sur Morbieux depuis chez nous.
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Heureusement, les choses en sont restées là.
yves philippe- MODERATEUR
- Nombre de messages : 2134
Ville : le Ménil
Age : 60
Points : 2755
Date d'inscription : 28/12/2010
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