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RAMONCHAMP - SOUVENIRS DE JEANNE VONFELD VVE RENÉ FEBVAY

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RAMONCHAMP - SOUVENIRS DE JEANNE VONFELD VVE RENÉ FEBVAY Empty RAMONCHAMP - SOUVENIRS DE JEANNE VONFELD VVE RENÉ FEBVAY

Message par yves philippe Dim 16 Oct 2016 - 14:10

Papa désire me voir prendre note des faits qui ont précédé et accompagné notre libération. J'ai obéi et voilà le récit de mon odyssée.

Mardi 22 août 1944 : libération de Paris. Nous sommes plein d'espoir. Paris est libéré en quatre jours.

Lundi 04 septembre : Prise de Bordeaux.

Mercredi 13 septembre : Je me lève et je vois .... deux Allemands qui se promènent autour du château Bernard. « Voilà les Boches qui veulent cantonner ici » me dis-je. Soupçons que trop fondés! Au bout d'une demi-heure, des véhicules militaires allemands arrivent. Nous déménageons précipitamment la vaisselle du château. Les misérables ont forcé la porte du parc qui est rempli de camions. Les Boches fourmillent.

Samedi 16 septembre : Vers 7 heures de l'après midi, les “Schleuhs” s'en vont. Nous déménageons des meubles du château. A 10 heures, ils arrivent de nouveaux. Zut!

Jeudi 21 septembre : Nous avons un réveil en musique. Un tintamarre horrible, d'assourdissants coups de canons. Je ne suis pas très rassurée.

Vendredi 22 septembre : Nous faisons les préparatifs pour pouvoir coucher à la cave de chez Léon Bazin, notre voisin. Il paraîtrait que les Allemands ont tiré pendant la nuit pour terroriser la population. Les Anglais mitraillent durant une demi-heure avec un fracas assourdissant. Mme Tremzal, une autre voisine et sa nièce continuent de faner. Ma foi, elles ne sont guère prudentes!

Samedi 23 septembre : Nous couchons à la cave de chez Bazin pour la première fois. C'est dur, nous sommes serrés, surexcités, nerveux. Quatre matelas pour treize, posés sur des planches sous lesquelles sont stockées les pommes de terre. Papa, Marie qui est une réfugiée d’Epinal, Clara Parot et Angèle Bazin se relayaient sur des chaises.

Dimanche 24 septembre: Sombre dimanche. Personne à la messe et nous n'avons pas été aux vêpres parce qu'on nous avait dit qu'on allait faire sauter fort prochainement le pont. Nous couchons encore à la cave. Nous sommes un peu mieux car il y a deux matelas de plus. Notre petite lampe à essence brûle toute la nuit car depuis huit jours nous n'avons plus de lumière électrique.

Lundi 25 septembre : Départ des Allemands. La scierie de Saulx brûle. La pièce qui est devant chez Brust, le ferblantier, au bas de la Route de Morbieux, tire avec un vacarme infernal. Nous couchons à la cave.

Mercredi 27 septembre : Arrivée de nouveaux Allemands. Ils logent leurs chevaux dans la remise à bois, mettent fort cavalièrement notre charrette et notre piano dehors. Nous couchons toujours à la cave.

Vendredi 29 septembre : Toute éplorée, Madame Noël, une autre voisine qui est la propriétaire de la maison habitée par les Bazin, vient chez nous: « Une pièce est installée dans notre jardin, derrière chez nous! » nous dit-elle. Nous sommes atterrées, nous aussi. Mais le soir, les Boches plient bagage et s'installent .... chez nous. Ils placent la pièce dans les trois sapins, les crapauds viennent chez nous, leur camion est mis sous l'émerollier. Ils s'emparent de notre salle à manger et de notre chambre à coucher, siègent presque en permanence à la cuisine. Quel poison! Papa, maman et mon frère Julien restent coucher chez nous. Nous autres, nous restons chez Bazin.

Samedi 30 septembre : Je suis complètement désemparée devant l'invasion de ma maison. Nous ne pouvons pas y retourner. La chambre de papa est seule à l'abri de leurs incursions. Je pleure de désespoir et de rage. Trois obus sont tombés chez Arnould, trois chez Bischoff, trois chez Paradis. Cela ne s'est pas fait sans bruit. Mr Duhoux, effectuant un déménagement sur la route de Morbieux a été tué. Nous déménageons du linge car ils vont sûrement bombarder et gare à notre maison!

Mercredi 04 octobre : Le matin, nous sommes obligés de donner un coq. Bombardements aux Meurgis, bruit effroyable! Les Boches ont manqué d'y passer car ils s'étaient hasardés par là. A midi, nouveau bombardement encore plus terrible. Nous en sommes assourdis. Un obus perfore la façade ouest du château Bernard. Le trou est énorme sous les deux fenêtres nord de cette façade. Les fenêtres pendent, les volets sont arrachés, le mur et la terrasse sont noirs de poudre. Presque tous les carreaux du salon sont brisés. Le salon, le petit salon, la salle à manger sont parsemés de pierres, de verre, de débris de toutes sortes. Les meubles n'ont presque rien, à part une table cassée. Plusieurs éclats sont fichés dans le plafond, les planchers, les meubles. Lamentable spectacle. Nous allons tous coucher à la cave Bazin. J'ai bien dormi, pourtant j'ai été réveillée par deux fois par des explosions assourdissantes et de fracas de verre brisé. Quel lamentable spectacle m'attend le matin ! A cinq mètres de la cuisine, un trou d'obus, quatre autres le long du chemin qui est noir de boue et jonché de branches d'arbres. Deux éclats sont entrés chez Bazin; un dans la boiserie de la porte, l'autre par la fenêtre en perforant en deux endroits le buffet. Dans l'après midi, nous sommes toujours réfugiés chez Bazin, on entend un combat infernal qui se livre en Haute Saône; mitrailleuses, fusils, canons, rien n'y manque. C'est noir de fumée. Puis nous voyons un homme en kaki descendre entre deux soldats allemands. Nous pensons que c'est un prisonnier, les Allemands disent que non, moi je suis sceptique.

Jeudi 5 octobre : Nous n'avons plus d'eau car la conduite a été crevée vers quatre heures par un obus.

Vendredi 6 octobre : Ce matin, papa s'est armé de courage et a réparé la conduite. Bruits de bataille du côté de la tête du Géhant. Aussitôt les Allemands font voltiger sur leur pièce et la posent près du poulailler dans cette direction. Ils font leurs paquets. Les Anglais lancent des obus repéreurs. Immédiatement papa nous envoie chez Bazin car il a dit que ces obus annoncent un bombardement. Mais ça ne donne rien. Des avions tournent pour repérer.

Samedi 7 octobre : Avions, bombardements assez lointains, mitrailleuses vers neuf heures. Ces jours derniers, Monsieur David a eu un côté emporté par un obus et Monsieur Fresse (Chancha) a été tué. Nous avons été presque toute la nuit à la cave car un bombardement effroyable a eu lieu. Il y a une trentaine de trous d'obus de plus dans le pré. Des obus sont tombés chez Rollot et y ont mis le feu. Le soir, le feu était chez Marquis, derrière chez Petitgenet. « Retirez vous! » ont crié les Allemands, lorsque papa, maman et Julien ont tenté d'aller chez nous. A cause du nombre et de la nécessité de se tenir à la cave, nous mangeons à tour de rôle sur un coin de table. Comme il n'y a pas beaucoup de dîner, je mange des pommes de terre rondes avec du sel. Zabette et sa mère Clara, qui retournaient chaque jour chez elles sont quand même venues. Nous n'espérions pas les voir à cause de l'intensité du bombardement. Cinq heures, tout d'un coup, grand remue-ménage. Nous voyons des Allemands courir à leur pièce. Deux chars s'avancent près de chez Duhoux. Nous filons à la cave mais ça ne donne rien. La nuit, nous sommes réveillés par un bruit terrible, puis plus rien. Papa dit: « C'est le pont ». Je pense: « Les amis approchent ». C'était vrai, le pont avait sauté, soufflant les toits, dégradant les maisons, faisant des dégâts horribles.

Dimanche 8 octobre: « Clara, emmène ta vache, car il en veulent à ma maison. La ramée sud-ouest est arrachée ainsi qu'une partie du toit, alors...!. ». C'est Monsieur Félicien Villemard qui à quatre heures du matin lance cet avis. Clara obéit car le trou est vraiment vilain. Madame Hélène Levrey, une autre voisine, effrayée, vient se réfugier chez Bazin. La nuit est fort mouvementée: Douze obus dans le pré des moutons, la maison Grosjean est bien endommagée. Les Français sont venus chercher la pièce du bas de la forêt, posée là par l'ennemi. Un Allemand et Marie Grosjean sont blessés. « Tout de même, a dit papa, il faut que je rentre chez nous ». Bien prudemment il s'avance, mais rien. Camions, pièces, Boches, tout était parti, sans doute pour éviter le sort réservé à la pièce du bas. Le chemin est jonché de tuiles car un obus est tombé au coin nord-ouest de notre maison, à un ou deux mètres du camion, trois autres au château. Nous ne voulons pas aller voir les dégâts!
09 heures : Au grand galop, des Allemands arrivent. Ils se débarrassent de leur capote pour courir plus vite. Nous allons chez nous pour déménager nos livres et nos cahiers. Nous nous apercevons que le mirabellier de derrière chez nous est brisé, que deux obus sont tombés chez Wannson. Nous ne pouvons monter au grenier pour constater les dégâts qu'a causés l'obus du fait que les objets qui s'y trouvent sont probablement tombés sur la trappe d'accès.
Victor Labrude, de l’Etraye, ramène sa vache. Il nous déclare: « J'ai vu les Américains! ».
On entend mitrailleuses et bombardements de façon très rapprochée.
Prudemment, nous descendons à la cave. Soudain, la porte s'ouvre et nous voyons entrer ... un Français et un Algérien. Il est midi. Joie! Exclamations! Nous dînons ensemble tranquillement.
Nous mangeons du lapin, puis nous descendons à la cave.
La veille, un Allemand a tué Camille Chevrier d'une balle au cœur.
A une heure et demie, nous voyons beaucoup de soldats dans la forêt. Nous sommes tous à la fenêtre. Cela leur déplait et ils nous tirent dessus. Aussitôt, direction le sous-sol.
A sept heures, six prisonniers allemands descendent sous bonne garde. Ils n'ont pas l'air bien glorieux.
Nous causons avec un Tunisien, car ce sont des Arabes qui nous ont libérés. Angèle donne du pain et du fromage à deux soldats affamés.
Richard Parmentier a été tué ce matin par les Allemands. Il épaulait un Alemand, un autre l'a vu et l'a massacré. Paul Tremzal est descendu sur un brancard, il avait été blessé au dessous du genou et aux cuisses. Maman, papa et Julien partent chez nous. Tout à coup, nous entendons des balles siffler et nous apercevons avec stupeur une cinquantaines d'Algériens qui se sauvent à toutes jambes. Papa, maman et Julien reviennent sous la mitraille. Une contre attaque allemande se déclenche. Elle dure environ une heure, une heure terrible. La mitrailleuse, les fusils donnent sans arrêt avec un vacarme infernal, les obus éclatent rageusement. J'ai peur, maman pleure de frayeur d'avoir dû passer sous les balles.
Quand nous remontons, cinq incendies sont visibles; chez Emile Noël, chez Desloyes, chez Groseille, chez Jordan et chez Joly. Bilan: Emile Noël et sa femme sont blessés, lui aux jambes, elle a le côté gauche de la figure emporté et une jambe brisée. Marie Canet est morte.
René Levrey vient se réfugier dans la cave de chez Bazin ainsi que Joséphine Souvay et sa fille Maria. Maxime Galmiche qui est blessé arrive ensuite, accompagné d'Alfred Kaltenbach, le commis de culture d’Angèle Bazin. C’est un Alsacien réfractaire qui se cache là. Papa panse le petit Maxime qui se montre très courageux, mais l'odeur de l'éther incommode Raymonde, la nièce d’Angèle qui nous vient également d’Epinal et qui tombe malade. On apprend que ce matin, la ferme du père Cunat a brûlé, il est gravement brûlé ainsi qu'une femme qui se trouvait avec lui.
Maria et Joséphine couchent avec nous et nous passons une nuit assez calme.

Lundi 9 octobre: Un Français et un Algérien prient maman de leur arranger une poule et du café, ce à quoi elle obtempère. Je vois monter mon premier tank. Les Allemands se réinstallent dans les buttes Grosjean. Les Français sont découragés et moi pas très rassurée.
Vers deux heures, nous voyons descendre Emile Noël et sa femme sur des civières.
Alfred, qui fait partie du maquis et que nous ne voyons pas beaucoup, couche pour la première fois à la cave avec nous.

Mardi 10 Ootobre : Une compagnie de renfort arrive. Ça me remet un peu. Des hommes étant entrés dans le château, papa, Julien et Alfred vont voir. La contre attaque appuyée par un char a échoué. Les Allemands sont venus jusqu’ici cette nuit, mais les Français occupent toujours la forêt.
Alfred est parti presque toute la journée, il a transporté des blessés, aidé Eugène Souvay, a dépouillé quatre de ses moutons tués par des éclats. Il a même lavé des langes de ses jumeaux Léopold et Agathe, sa femme n'en avait pas le courage.
Des Français cantonnent chez Hélène Levrey, chez Maria Grosjean. Deux chars prennent position dans la butte de la forêt. Nous entendons des bruits de mitrailleuses, de canons, mais nous ne savons ce que c'est, ni le résultat. Je vis comme dans un mauvais rêve. Nous pouvons manger, dîner, goûter et souper en haut, les autres jours c'était à la cave.

Mercredi 11 octobre : Gaby, la sœur de Raymonde, part à Epinal, pour voir l'état du logement de Marie. Forts coups de canon. Le tank a tiré dans un vacarme infernal presque toute l'après midi et met le feu au hangar de chez David parce que les Allemands occupent l'usine de l'Etat, les Breuches, la maison Ferjeux, le Meurgis, le bois Chantôle. Ils sont donc tout près de nous.
Gaby revient vers huit heures du soir alors que nous sommes déjà au lit. Jugez de l'étrangeté de notre vie. Lever tard, dîner à onze heures de peur des obus, goûter à quatre heures, souper tôt à cinq heures, coucher à huit heures pour économiser l'éclairage, le combustible.

Jeudi 12 octobre : Cette nuit, les Français couchent chez Bazin. Marie et Raymonde partent à une heure, dans l'auto de Monsieur Mangin pour occuper leur logement qui n'a pas de mal. Papa et Alfred leur portent leurs bagages, ils sont obligés de se mettre deux fois dans des trous afin de se protéger des tirs. Ce matin, les Breuches ont été fortement bombardés. Un FFI a donné à Alfred la mission d'aller chercher le fusil mitrailleur de Pivel qui vient d'être blessé. Aidé de Marthe, ils descendent l'arme sur une échelle, comme pour un mort, car ils étaient à découvert des Allemands. Arrivé près de chez Blaison, il a ôté le drap de l'échelle et l'a donné à Marthe, mais un lieutenant français qui avait vu le manège fait arrêter Alfred et l'expédie au poste de commandement. De là il le transfère en voiture jusqu'à Ferdrupt, accompagné d'un prêtre et flanqué de deux soldats portant un fusil mitrailleur. Enfin, ils l'ont relâché.
Hier, deux obus sont tombés au château, un éclatant au milieu du salon, l'autre balayant les deux balcons de la façade ouest. Il y a cinq Français et des chars chez nous.
Les Tabors qui sont venus chez nous dimanche ont pillé la maison qui est dans un fouillis inextricable. Le char bombarde à nouveau les Breuches et incendie la ferme Montémont.
Les Français ont averti Monsieur Félix qui habite l’Etraye; « Dans un quart d'heure, on bombarde le bois, on ne répond pas des maisons, partez! ».
Cinq minutes après, le lamentable exode commence. Toute la famille Félix et leurs réfugiés, les trois Desloyes et les trois Grisvard, descendent avec leurs petits paquets. Ils s'arrêtent un peu chez Bazin puis repartent. Comme je les plains!
Monsieur Félix est remonté, il a descendu sa vache et la met chez Levrey. Tous ces tragiques évènements me bouleversent et je suis bien découragée.
Madame Tremzal est descendue à son tour. « Les Breuches sont brûlés ou détruits » affirme t-elle. Ce n'est que trop vrai. Une de ses vaches et un de ses veaux sont placés chez Félicien Villemard l'autre vache et l'autre veau chez Angèle Bazin.
La mère Tremzal reste chez Bazin. La nuit est assez mouvementée, Angèle s'est relevée deux fois.

Vendredi 13 octobre. Je me lève la troisième, à sept heures, après Angèle et Alfred. Je le regarde traire la vache pour dissiper mon cafard. Le tank est parti.
Robert Maurice, un voisin qui est dans la résistance, vient demander à Alfred de monter une faction au village en vue d'éviter le pillage. « Les Français ont miné les sapins du côté de chez Brice au bord de la route nationale, nous dit-il. Ils les feront sauter quand les Allemands avanceront, ainsi que le pont qu'ils ont refait ».
Monsieur Blaison est venu dire à Angèle qu'elle mène si elle le voulait ses vaches chez Olympe parce qu'elle est dans la zone dangereuse. Mon cafard me reprend plus fort que jamais suite à ces mauvaises nouvelles.
Avec les Chevrier, les Bazin et les Levrey, nous sommes les seuls de l'Etraye à n'avoir pas déserté le secteur. La belle sœur d'Angèle vient. Elle nous dit que les Américains sont à « La Culbute » et qu'ils cherchent à encercler Belfort. Ça me remet un tout petit peu. Madame Emile Noël est morte à l'hôpital des suites de ses blessures.
Madame Tremzal remonte chez elle, les Boches n'y sont pas. Papa, Alfred et Julien vont chez nous mais ils n'ont que le temps de revenir entre deux rafales de mortiers. Quatre soldats qui sont chez nous sont touchés; deux tués, deux blessés.
Un nouvel obus est tombé chez nous faisant un trou dans la partie sud-ouest du grenier.
Les vieux Dieudonné qui regardaient par leur fenêtre ont eu la tête arrachée par les éclats.
Les nouveaux soldats donnent à Julien des biscuits, des caramels, des allumettes. J'apprends à jouer à la manille. Un poste de dix hommes s'installe chez Bazin.
Dans la nuit, le canon tonne beaucoup, je reste longtemps éveillée.

Samedi 14 octobre: Les Français font faire leur cacao à Angèle. Ils sont bien gentils. Ce sont de jeunes FFI du massif central. Ils jouent aux chevaux avec moi, me donnent des biscuits, des pâtes de fruits, du chocolat.
Un obus est tombé tout près de chez nous, un 105 dans le pré, un autre sur le hangar de chez Levrey. Les Français ont fait une préparation d'artillerie. Nous descendons dans la cave avec les soldats. Pendant ce temps, des Polonais et des Russes viennent. J'en ai peur mais heureusement ils repartent car ils montent à l'attaque. Pourtant un d'entre eux reste et vient s'asseoir près de moi à la cave. Brrr!.
La relève arrive dans la nuit et ils partent. Au matin, nous sommes seuls.
Le soir, Adeline, une dame de Ramonchamp arrive. Elle est passée par Remanvillers et a manqué de se faire tuer par un soldat à qui elle n'a pas répondu.
La nuit, les Allemands bombardent la scierie Duhoux. Elle prend feu, tout est rasé.

Dimanche 15 octobre : Hier pendant que nous étions à la cave, un obus est tombé près du noyer qui est devant chez Bazin. Les vitres ont volé en éclats et les volets de la chambre d'Alfred ont été soufflés.
C'est aujourd'hui que les Allemands doivent essayer leur nouvelle arme. J'ai rudement peur que ce ne soit des gaz. Le temps est magnifique, le secteur calme, quelques avions passent. Maman retrouve mon bracelet. On entend de lointains coups de canons.
Dans le soir les Américains bombardent les Boches. Ceux-ci ripostent, nous sommes obligés de souper à la cave. Nous ne voyons plus de soldats.

Lundi 16 octobre : Jour triste et sombre. Papa a mal à la jambe, le père Cunat est mort. Il pleut. Alfred et Angèle rapportent le ravitaillement; du sucre, des confitures, des pâtes, des biscuits, du gruyère. Ils repartent chez la mère d'Angèle qui est toujours ici et dont la toux nous importune fortement. Ils rapportent du linge et son lapin. Papa va au lit l'après midi, à la cave et pour le « désennuyer » je lui raconte des histoires. J'apprends à jouer à la belote et je perds. Nous dînons à la cave car le char tire et les Boches ripostent.

Mardi 17 octobre : Papa va mieux. Alfred est allé chercher notre pain pour deux jours : 2kg 400 de pain blanc. Secteur calme. Les Tabors sont chez nous où tout est trempé et dans un fouillis immonde.

Mercredi 18 octobre : Il pleut, il pleut, il pleut toujours. Papa ne peut aller chez nous à cause du mauvais temps et des bombardements. Des sapins, criblés d'éclats et poussés par le vent se sont effondrés dans un fracas horrible. Vers le soir, ça se calme, nous voyons les Français fouiller un gradé et un soldat allemand, prisonniers devant le château. Le char tire, les Allemands ripostent, une drôle d'odeur se répand. J'ai une peur terrible que ce ne soit les gaz. Enfin, elle se dissipe.
Alfred ne dort pas à la cave bien que la nuit soit fort mouvementée.

Jeudi 19 octobre : Il pleut toujours. La nuit dernière, Henri Rouillon a été blessé à la tête par l'explosion d'une mine. Le soldat français qui l'accompagnait a été tué. Adeline, qui n'est pas encore sortie de la cave depuis son arrivée, remonte à midi. Les Français nous ont volé notre sucre et toute notre confiture. Heureusement que nous en toucherons un peu ce soir. C'est Alfred qui nous rapporte du sucre, des confitures et du pain.
Forts coups de canon au cours de la nuit. La remise et le toit de chez Girardin, l’ancienne brasserie, ont reçu un obus.

Vendredi 20 octobre: Il ne pleut plus. Tant mieux, car avec toutes ces maisons découvertes.... . Les eaux ont un peu baissé.
Nous avons enfin des nouvelles de Grand-père et de Grand-mère, ça faisait un mois que nous n'avions plus de nouvelles d'eux. Pauvre Grand-mère, avec tous les obus tombés sur l'Etraye, comme elle a dû s'en faire, d'autant qu'elle n'avait probablement pas de nouvelles de nous non plus. C'est Gaby qui nous apporte ces nouvelles qu'elle avait obtenues auprès de Clara Labrude qui avait vu passer Grand-père et Grand-mère et un cochon. Ils se rendaient à Xoarupt. Ils sont donc hors de la tourmente.
Alfred va chercher le ravitaillement chez Petitgenet avec Félicien. Dimanche, ça sera au tour de papa et de M. Levrey.
Des avions lancent des bombes à la filature. Nous pensons qu'ils devaient bombarder l'Etat et qu'ils se trompent. Nous descendons vite à la cave car les avions continuent à tourner avec un bruit terrifiant. Gros bombardements lointains. Valentine Chevrier vient. Elle nous apprend la mort de Camille Joly qui date du 8 octobre. Il avait reçu une rafale de mitrailleuse dans le ventre.
La tête du Géhant est prise depuis quelque temps déjà.

Samedi 21 octobre : Le ciel est bas. En descendant à la cave, je suis tombée sur le dos. J'ai eu la respiration coupée et j'ai bien mal. Cette nuit, une patrouille allemande est passée près de chez Bazin et est montée vers chez Blaison. Les Français n'ont pu faire qu'un prisonnier. La mère Tremzal va chez elle, il n'y a toujours pas d'Allemand. Papa ramène le poste TSF, il n'a que trois éclats malgré sa proximité du point de chute de l'obus, mais il est plein d'eau. Rien n’est cassé.

Dimanche 22 octobre : Il ne pleut pas, secteur calme, nombreux passages d'avions, quelques arrivées de soldats.

Lundi 23 octobre : Temps brumeux, forts coups de canon l'après midi. La nuit, roulements lointains et ininterrompus.

Mardi 24 octobre : Il pleut. Secteur calme, pour la première fois je vais chez nous. Je ramène un peu de pharmacie courante car les Français avaient tout pillé. Ils ont pris notre graisse, notre vin, une dizaine de bouteilles de conserves et ils ont cassé les goulots.

Mercredi 25 octobre : Secteur calme sauf l'après midi. Papa va au château.

Jeudi 26 octobre : Coups de mitrailleuse. Gaby va chercher un laissez-passer pour aller à Epinal. Elle l'obtient après maintes péripéties. Les soldats de la Légion Etrangère et les fusillés marins relèvent les autres soldats.

Vendredi 27 octobre : Les Allemands nous bombardent. Pierre David est blessé à la cuisse. Gaby et son fiancé Georges David partent pour Epinal. Forts coups de canon et de mitrailleuse le soir. Je vois passer en gerbes d'étincelles les traçantes. J'ai peur et je me dis que si j'avais vu passer toutes les traçantes le soir de la contre attaque, je serais devenue folle tellement l'impression est pénible.

Samedi 28 octobre : Il n'y a plus de soldats chez nous. Bon débarras. Quatre ou cinq nouveaux obus sont tombés près de chez nous.

Mercredi 1er novembre: Bombardements intenses sur le Thillot. Une dizaine de morts. Il fait un temps magnifique qui me remet un peu. Ça fait si longtemps que nous n'avions pas vu le soleil!

Dimanche 5 novembre: Bombardements du château Lambert au Thillot. J'ai mal au nez. Papa est allé voir Grand-mère, elle va bien mais Grand-père a été blessé au cou et aux jambes. Je crois même qu'il est guéri, tant mieux. Je me demande bien ce que font Tante Lucienne et Oncle Charles. Charles n'est-il pas déporté? Ne souffrent-ils pas de la faim? Car on dit que les enfants meurent faute de lait, que des gens sont affamés. Enfin, ils sont peut être passés. Alfred monte la garde depuis deux nuits à la filature. Ils sont allés patrouiller avec des camarades, jusqu'à l'Etat.
Des chars bombardent la Champagne, depuis chez Chevrier. La maison tremble terriblement.
Le hangar de Janvian a brûlé. Ils bombardent avec acharnement la maison Tottoli. Une fois la fumée dissipée, elle est pourtant toujours debout.

Mercredi 8 novembre : Les soldats défendent à Papa d'aller chez nous, mais une fois la relève faite, papa descend, accompagné de son inséparable Julien à la maison Levrey pour obtenir l'autorisation du poste. Les soldats disent oui et deux d'entre eux accompagnent papa. Julien, que Mr Levrey avait essayé de retenir, réussit à s'échapper et court pour rejoindre papa qui était déjà au milieu du pré. Mais les soldats ont miné le petit pont. Julien qui courait sans regarder ses pieds marche sur le filet et amorce une grenade qui fait psssst. Julien effrayé se sauve à toutes jambes, les soldats se retournent et boum, c'est la grenade qui saute. Nous qui les regardons par la fenêtre avons une belle peur. Enfin, aucun n'a été blessé. Les soldats sont ennuyés car ils éveillaient ainsi la méfiance des Allemands. Enfin, ils reviennent avec un matelas et des oreillers. L'après midi, un petit « minen » éclate sur le sentier où Georges David venait de passer une demie heure auparavant. Nous espérons bientôt être libérés. Il a plu toute la journée.

Jeudi 9 novembre : Il ne pleut plus. Un obus est tombé dans le pré des moutons et un autre près de chez Vannson. La relève a été faite hier soir, à la place des Algériens, il y a des Parisiens. Papa est allé chercher du pain avec Valentine et Julien car Alfred n'est pas revenu. Il a neigé, tout est blanc. Je vois tomber cette neige et je suis découragée, tous mes espoirs s'en vont. Il fait froid. Une patrouille allemande passe près de chez Bazin vers dix heures et revient vers trois heures du matin.
On apprend par Monsieur Masson que Gustave Leduc a eu la tête emportée lors du bombardement de sa maison et de celle des Tottoli le 5 novembre. M. Masson était passé avec deux cents personnes par le Ménil. Un général francais avait passé sur son cheval deux tout petits enfants. Monsieur Masson a dit aussi que M. Mangel avait été blessé par les Allemands qui ont aussi massacré Roland Hoffner et un nommé Jeudy; un enfant et un vieillard.

Vendredi 10 novembre : Il n'a pas neigé pendant la nuit. Deux lieutenants viennent voir si on a vu passer des patrouilles. Nous n'avions rien remarqué. Cet après midi, il neige, il neige encore. Un soldat vient voir si Madame Tremzal n'a rien remarqué quand elle est allée chez elle. Elle répond qu'on y était entré.

Dimanche 11 novembre : Nous avons couché en haut, dans la chambre de Marie Noël. Enfin finie cette horrible vie des caves où nous végétions depuis le 23 septembre. Finie cette horrible descente dans le caveau noir, humide, enfumé, plein de suintements, dans lequel nous venions de passer ces semaines d'horreur. Plus à craindre ces gouttes glacées qui nous tombaient dessus. Maintenant, nous couchons en haut ! Nous recommençons à revivre !

Lundi 12 novembre : Il a neigé beaucoup pendant la nuit et il fait froid. Monsieur Grosjean est mort. Papa va l'enterrer avec M. Blaison. Léonie Hans est morte aussi, tuée par un obus, ainsi que cinq Allemands. Je suis de nouveau désespérée. Un soldat espion part avec madame Tremzal chez elle.

Jeudi 16 novembre : Le lieutenant vient et dit à Mme Tremzal « Grâce à l'homme qui est allé avec vous, madame, nous avons pu aller jusqu'au Thillot. Mais quand nous sommes revenus, nous nous sommes fait allumer. C'est la purée de pois qu'il fait qui nous a sauvés. On ne voyait pas à dix mètres. Mais nous en sommes revenus. Les Allemands étaient chez Laugier, chez Félix et chez vous ».

Vendredi 17 novembre : Quelle nuit terrible nous avons passée! Vers 9 heures hier soir les Français ont commencé. Les Allemands ont riposté avec des « minen » et au moins au 105, mais nous ne sommes pas descendus à la cave. Au matin nous avons vu les dégâts; cinq trous dans le pré de la mère Scheyer, au fond du talus, derrière chez Levrey où la vache a été blessée.
Les Français tirent à la mitrailleuse. Gaby a pris peur pour son ménage et avec papa, elle effectue son déménagement. On dit que chez Hans c'est brûlé.

Samedi 18 novembre : Bonnes nouvelles ! Gaby, à la recherche d'un camion est allée à Rupt. En voyant le remue ménage qui y régnait elle a questionné un soldat qui lui a dit que Belfort devait être prise cette nuit ou demain et qu'ils préparaient leur camion pour s'y rendre. Un capitaine a dit que l'offensive était déclenchée et que nous allions être libérés prochainement. Il n'est pas trop tôt!
Bien malheureusement aussi on apprend que les Boches ont incendié La Bresse et Saint Dié. Des gens ont même vu des lueurs de l'incendie. Les Français vont encore en patrouille. Les Allemands qui sont embusqués dans le ruisseau les ont attaqués quand ils sont passés. Ça s'est encore aggravé lorsqu'un soldat français, voulant lancer une fusée éclairante sur les Boches l’a lancée… sur eux mêmes.

Dimanche 19 novembre : Il a gelé. Forts bombardements lointains. Trente deux bombardiers passent vers onze heures. Georges nous apporte de bien tristes nouvelles; « Ils évacuent totalement Le Thillot ». Pauvres gens! Comme nous les plaignions! Nous qui avions eu si peur un jour quand on nous avait dit : « On sera évacué certainement le ... ». Et Marie qui est allée se réfugier au Thillot, croyant fuir l'orage, et qui est allée se jeter dans la gueule du loup. Que fait-elle maintenant? Où est-elle partie? Enfin, espèrerons que les Allemands ne feront pas subir au Thillot le même sort que celui de St Dié, et que le Thillot soit bientôt libéré.

Lundi 20 novembre : La nuit est assez calme. Nous allons arracher des pommes de terre. Nous remontons avec notre charrette lorsque nous entendons des coups de fusil. « Dix soldats montent à l'attaque du bois Chantôle! » nous dit Jacques mon autre frère. C'est vrai, pour appuyer leur attaque, les pièces se mettent à tirer, mais trop court et c'est nous qui recevons l'avalanche. Une demi-douzaine dans le pré, devant et derrière.
Je dîne à la cave. Vers 11 heures, nous les revoyons redescendre avec deux blessés. Ils vont vite, en paquets, ils sont tout mouillés. Un a eu huit balles dans le ventre, l'autre des éclats dans les poumons, il en est mort.

Mardi 21 novembre : L'après midi, nous allons aux pommes de terre. Une torpille est tombée chez Levrey et s'est logée derrière la cuisinière. Comme le trou n'était pas gros, elle n'a pas éclaté. Les Levrey croyaient que ce n'était qu'un éclat. René, en bricolant derrière le fourneau a demandé à sa mère: « Qu'est ce que c'est que du bout de fonte que tu as mis là? ». « Mais je n'ai rien mis » répond sa mère. Les soldats regardent, c'est une torpille. Ils l'enlèvent et la mettent dans un trou d'obus. Elle pèse cinq kilos environ.
Le soir, grand brouhaha. De nombreux soldats montent accompagnés de tanks qui se mettent en position près de chez Chonavel. Ils vont attaquer la maison Ferjeux. Les tanks tirent, la fusillade éclate, puis plus rien. Nous sommes très anxieux.

Mercredi 22 novembre : Bombardement terrible au château Lambert. Ca roule!, ça roule!, aie, ça donne de tous les côtés. Ils attaquent le bois Chantôle, la chapelle Bellevue. Ils espèrent coucher au Thillot ce soir, mais c'est dur. Nous espérons être bientôt libérés. Nous voyons un homme qui est allé chez Jules Fresse. « Les fermes là-bas sont libérées » nous dit-il. Les soldats ont occupé le Haut du Seu mais ont été obligés de reculer.
Deux obus tombent au coin des rosiers. Des 88. Ça sonne dur!

Jeudi 23 novembre : Ça tiraille un peu partout. En revenant Julien a marché sur un fil de grenade et l'a fait sauter. Tout le monde essaye de regagner ses pénates. Ce matin, nous voyons Félix et M. Cunat, René Choffel, M. Fresse et un autre, Eugène et le gendre d'Emile Noël.
Cet après midi, nous allons nettoyer chez nous, pendant que papa va au pain. Nous savons enfin que Tante et Charles ont pu passer et qu'ils sont à Chaumont. C'est André Félix qui l'a dit à Papa. Tant mieux, mais nous nous demandons pourquoi ils sont partis si loin. Enfin, quand il faut suivre le convoi, on ne fait pas ce qu'on veut.
Prise du Château Lambert, du Col des Croix, de Mulhouse, de Colmar, de Dieuze.

Samedi 25 novembre : Secteur assez calme. Nous allons chez nous pour ranger. Malgré les bombardements français, les Allemands n'ont pas répondu. Nous en sommes tout étonnés. Deux soldats égarés, venant de l'infirmerie ont passé la nuit et l'après midi chez Bazin. Ce sont de tout jeunes FFI des Pyrénées, mal commandés, profondément découragés et démoralisés. Ils n'aspirent qu'à rentrer chez eux.

Dimanche 26 novembre : Ni départ, ni arrivée. Calme insolite. Par contre circulation intense sur la route. Jacques compte environ cinq cents soldats qui montent avec des mulets. Monsieur le curé a dit que Fresse sur Moselle est prise et que les Français sont au tunnel de Bussang.
Vers onze heures, nous entendons les cloches. Nous sautons de joie. Nous sommes libérés, puisque nous entendons les cloches! Nous nous sentons revivre. Plus d'éternelle obsession de la mort dans nos esprits. Plus à craindre que les obus ne nous tombent dessus, car à chaque moment, et aux moments où nous nous y attendions le moins, voilà l'avalanche!
Papa avait dit que ça irait vite, mais nous ne pensions pas vite à ce point. Enfin nous y sommes, c'est le principal.
C'est le 8 octobre que les Français sont entrés dans Ramonchamp et c'est le 26 novembre que l'affreux cauchemar se termine. Il n'est pas trop tôt.
Cet après- midi, nous allons ramasser nos choux.

Lundi 27 novembre : Nous ramassons nos pommes de terre.

Jeudi 31 novembre : Les Français viennent enterrer les deux Boches qui étaient près de chez nous.

Vendredi 1er Ddcembre : Nous entrons enfin chez nous. Depuis le 7 octobre que nous n'y avions plus habité. Notre maison n'a plus de vitre, tout est sans dessus dessous, plus d'électricité, le toit a reçu de nombreux obus, mais les murs tiennent bon.

Dimanche 3 décembre : Je vais voir Grand-mère. C'est la première fois depuis plus de deux mois. Grand-père était venu le jour de la libération mais pas Grand-mère. Aujourd'hui, il y a eu une messe à l'église. Depuis le 30 septembre qu'il n'y en avait plus eu.

Samedi 9 Ddcembre : Je vais voir Marie Willmann au Thillot. Elle va bien, elle n'a pas été plus loin que le Ménil. Elle est bien contente de me voir et moi aussi! Je revois Tante et Charles. Ils sont enfin revenus! Leur maison n'a pas de mal et leur cave n'a pas été pillée.

Jeudi 14 décembre : Nous avons fini d'arracher nos pommes de terre sous la neige. On avait commencé le 15 septembre!

Samedi 16 décembre : Les Allemands ont repassé le Rhin avec quatre cents chars. Ils ont repris Mulhouse et marchent sur Belfort.
J'ai peur de retomber sous leur domination.


yves philippe
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