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RAMONCHAMP - SOUVENIR DES SŒURS JOLY - SUZANNE PAULETTE ET MICHELINE

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RAMONCHAMP - SOUVENIR DES SŒURS JOLY - SUZANNE PAULETTE ET MICHELINE Empty RAMONCHAMP - SOUVENIR DES SŒURS JOLY - SUZANNE PAULETTE ET MICHELINE

Message par yves philippe Dim 16 Oct 2016 - 13:47

Souvenirs de Suzanne Joly épouse Jules Trommenschlager, précisés par ses sœurs
Paulette veuve Marcel Creusot et Micheline veuve René Grandmougin



----Suzanne : « Au début de la guerre j'habitais chez mes parents à l'Etraye avec mes frères et sœurs. Je travaillais chez Sailley. Comme nous étions un peu sur les hauteurs, c'était calme tandis qu'au village les Allemands ramassaient tout dans les magasins ».

----Micheline : « Je me souviens qu'on a « rhabillé » en civil beaucoup de soldats français. On leur donnait même un outil pour faire croire qu'il s'agissait de paysans ».

----Suzanne : « Je me suis mariée en 1942 et je suis allée habiter dans une ferme dans les dessus de Morbieux, en revenant sur la Sûre. Nous avons commencé à tenir la ferme avec deux vaches. J'ai eu Dédé, mon gamin en 42, donc j’avais de quoi m'occuper. Nous étions presque autonomes, on vivait dans un écart de Ramonchamp, donc je n'ai pas beaucoup d'anecdotes à raconter sur ce qui s'est passé au village. Nous avons réellement commencé à subir la guerre qu'en 1944.

En 1944 nous avons été réquisitionnés d'une vache. Les Allemands voulaient aussi un cochon, mais nous n'en avions pas pour eux. On avait caché le nôtre à la cave le jour du comptage. On lui avait donné une bonne ration pour ne pas qu'il se mette à grogner au moment fatidique.

Fin 1944, les Allemands ont annexé notre ferme parce qu'il y avait des combats au Col de la Sûre, alors on couchait à l'écurie, avec nos vaches, alors qu’eux dormaient dans nos lits.
Je venais d'accoucher de ma fille, Nicole en juin 1944. Peu de temps après, j'ai hébergé deux de mes sœurs, Paulette et Micheline. Elle m'aidaient un peu et ça laissait de la place chez mes parents qui ont passé leur temps à héberger ou nourrir des gens qui venaient du Thillot ».

----Micheline : « Oui, nous sommes montées chez Suzanne vers le mois d'août 44 ».

----Suzanne : « Une nuit, j'avais oublié le biberon de ma gamine à la cuisine, j'avais peur des Allemands et je n'osais pas aller le chercher à la cuisine. C'est Paulette qui s'est dévouée pour aller chercher mon biberon, elle était plus courageuse que moi ».

----Paulette : « Oui, c'est vrai, j'avais peur de rien à ce moment là. J'ai pris le biberon, mais je me suis prise un bon coup de pied aux fesses par un Allemand. Ils ne voulaient pas nous voir là, peut être qu'ils pensaient que je les espionnais ».

----Suzanne : « En octobre, j'ai également hébergé la famille Blaison, des voisins de mes parents. Ils avaient tous fui les bas pour venir se réfugier sur les hauteurs à cause des bombardements ».

---- Paulette : « Depuis là-haut, je descendais au village à pied pour acheter le pain. Au passage je laissais Dédé, le gamin de ma sœur chez ses grands-parents et je le reprenais en remontant ».

---- Micheline : « Je me souviens qu'une fois, les Allemands m'avaient enfermée, pour rire, dans la caisse à bois. Je me rappelle aussi que ce soir là, ils voulaient que je boive leur potage, mais Julot, le mari de ma sœur m'avait conseillé de les laisser goûter le potage avant de me servir. Au final on a tout de même mangé la soupe avec eux ».

----Suzanne : « A l’arrivée des alliés, les Allemands étaient terrorisés, ils allaient régulièrement derrière la maison pour voir si personne n'arrivait. Nous étions donc condamnés à rester à l'écurie puisque chacun de nos mouvements fait à l'extérieur de chez nous aurait pu être pris pour un acte terroriste ».

----Paulette : « J'étais enragée, j'allais toujours voir ce qu'ils guettaient ».

----Suzanne : « Ils sont partis au cours d'une nuit avec leur cheval et une charrette. J'étais tellement heureuse que j'ai fait une tarte pour fêter leur départ. Manque de chance, le soir ils étaient revenus. Ils étaient méchants, on voyait bien que ça n'allait plus comme ils le voulaient. Ils sont repartis au cours de la nuit d'après, au matin je me suis dit que j'attendrais un peu plus longtemps pour faire ma tarte.
Après leur départ, on a remarqué qu'ils avaient laissé un réveil sur le rebord de fenêtre de la fontaine. Nous avons été un bon moment avant d'y toucher à ce réveil, nous avions peur qu'il ne soit piégé. C'est René Levrey, le propriétaire de la maison qui est allé chercher le réveil, comme il vivait seul, c’est lui qui s’est dévoué. Tout compte fait, il ne s'est rien passé, mais c'est pour vous dire que la peur et le souci étaient constamment présents à nos esprits.

Nous étions isolés du village, nous ne savions pas ce qu'il s'y passait. Mon frère Camille a été tué près de la maison de mes parents à l'Etraye, leur ferme a été incendiée, je ne l'ai su que plus tard ».

---- Micheline : « Voici l'histoire: le jeudi 5 octobre 44 dans l'après midi, à la demande de Maurice Pivel, qui était au maquis, mon frère Robert et mes parents sont allés arracher des pommes de terre pour organiser un casse croûte pour les parachutistes français qui se trouvaient dans la forêt au dessus de l'Etraye. Il y a eu alors de gros bombardements et notre maison a subi de gros dommages. Les portes, les fenêtres étaient éventrées. Les meubles étaient même tombés au sol. Papa n'a pas voulu quitter sa maison. Maman est descendue avec Robert, pour coucher chez des voisins.
Vers minuit, maman s'inquiétait pour Papa, c'est Robert qui est monté chez nous, de nuit, pour savoir ce qu'il s'y passait. Robert est redescendu et a rassuré maman. Il était courageux Robert, bien que ce n'était qu'un gamin de 15 ans.
Dans la journée du vendredi, maman et remontée chez nous. Ils ont commencé à réparer ce qu'ils ont pu.
Le samedi après midi, une vingtaine de parachutistes français sont arrivés à la maison, ils n'avaient pas mangé depuis deux jours. Maman leur a préparé à manger et ils sont partis en reconnaissance, avec Robert en éclaireur, jusqu'au fond de l'Etraye. Ils n'ont vu aucun Allemand et sont tous revenus à la maison pour manger la bonne choucroute et les deux tartes que maman avait faites. Les soldats ont dit à maman: « Madame, demain pour 10 heures, vous serez libérés ».
Le dimanche 8, Paul, un de nos frères, qui jusque là était au maquis, se trouvait chez nous. Il avait caché depuis quelques jours des fusils parmi le tas d'outils qui étaient appuyés, comme dans toutes les fermes, près de la porte cochère de la maison. Il avait dit: « Le premier Boche qui met les pieds ici, je le tue ». Ce jour là, un Boche est arrivé pour boire à la fontaine. Maman a juste eu le temps de dire, en patois, à Popol de ne rien faire parce que nous avions plein de Boches dans le pré. Popol s'est enfui en passant par le grenier. Les Boches sont arrivés chez nous. Camille, notre frère ainé se trouvait là lui aussi. Il a demandé aux Allemands s'il pouvait aller voir son gamin d'un mois qu'il avait confié à la famille Frattini qui n’habitait pas loin. Les Allemands lui ont donné leur accord mais ça ne les a pas empêchés de lui tirer dessus à distance. Probablement qu'ils ont pensé qu'il s'enfuyait puisqu'il repartait vers les lignes françaises. Papa est allé rechercher Camille et a failli y passer lui aussi. Il a ramené Camille agonisant. Il avait pris une balle dans le bas du ventre et perdait beaucoup de sang. Papa l'a déposé dans le hangar devant la maison.
Ils étaient tous là lorsque Robert Montémont, notre oncle est arrivé pour leur dire: « Sauvez vous, votre maison brûle ».
Juste après, les parachutistes français ont attaqué. C'est là que le Capitaine Roger Chevallier a été tué. Un Boche a eu le « toupet » de lui voler sa montre en or et ses cigarettes américaines. Il a eu aussi le culot de venir offrir une de ces cigarettes à mon frère qui était mourant. Camille a refusé.
Papa a porté Camille chez une voisine, mais il est mort dans ses bras.

Insérer photo para capitaine Chevailler

Deux Allemands ont brûlé vif dans notre maison. Un dans la cave et l'autre, qui était blessé et qui s'était caché sous le bassin de fontaine.
Mes parents ont dû se résoudre à quitter les lieux qui ont été minés par les Allemands, ce qui fait que l’hiver une fois arrivé, les choses sont restées en l'état et les corps n'ont été retrouvés que plusieurs mois après.
Deux parachutistes français, les nommés Véras et Martin sont également morts au dessus de chez nous ».

----Suzanne : « Je ne sais plus qui nous a dit aussi qu'une femme soldat aurait été retrouvée pendue au Col de Morbieux. Je ne sais plus s'il s'agissait d'une Française ou d'une Allemande ».

----Paulette : « C'est Popol qui nous l'a dit. Après s'être enfui de chez nous, il a voulu retourner sur place avec Roger Trommenschlager pour voir si personne n'avait été pris par l'incendie. Ils ont été coincés par les lignes ennemies et ont dû rester deux ou trois jours Chez Robert Montemont où se trouvaient mes parents. Ensuite ils ont décidé de tenter de revenir sur Morbieux. C'est sur ce trajet retour qu'ils ont vu une femme soldat, une Allemande, qui était pendue à un arbre. Cette vue les a terrorisés ».

----Suzanne : « Ensuite ce sont les Tabors qui sont passés chez nous à Morbieux. J'ai voulu leur payer un coup mais ils n'ont rien voulu. Ils m'ont demandé des renseignements sur les Allemands et ont poursuivi leur progression. Après cela, nous avons encore vu deux Allemands qui s'enfuyaient. En passant chez nous, ils nous ont laissé du café, avant de repartir par le bois. Ce sont les deux derniers que nous avons vus ».


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