LE MENIL - SOUVENIRS DE CYRIL BRIOT
FOREST :: VALLEE DE LA HAUTE MOSELLE, Rupt sur Moselle à Bussang :: "Recueil de témoignages sur le vécu sous la botte Allemande ( 39-45)
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LE MENIL - SOUVENIRS DE CYRIL BRIOT
Le 1er contingent de la classe 40 dont je faisais partie a été mobilisé le 09 Juin. J'ai été affecté dans un régiment de Génie à Montargis, dans le Loiret.
Ca commençait mal pour moi, d'abord, j'avais les Boches aux trousses et la gare de Sens ayant été bombardée, il a fallu, depuis Epinal, que je descende à Dijon, que je remonte à Paris, pour pouvoir arriver à Montargis le lundi soir.
Le mercredi nous sommes partis de Montargis, en rang par trois, percevoir nos tenues dans un cantonnement à la sortie de la ville. C'était des tenues de la guerre 14!. Allez savoir pourquoi, ils nous ont donné cinq chemises pour trois.
J'ai perçu un pantalon trop court, une veste sans bouton et la boite carrée qui servait déjà de cantine aux poilus de 14. C'est sûr qu'équipé comme ça, on n'allait pas gagner la guerre!
Le vendredi, nous apprenons que la 5ème compagnie, à laquelle j'appartiens désormais, va changer de cantonnement.
Un train avait bien été affrété pour nous trois jours avant, mais notre Colonel a jugé qu'il était préférable que nous partions à pied. En réalité, c'était la débâcle.
Nous voici donc partis à neuf heures du soir avec notre boite à paquetage, nos couvertures et tout le fourbi, direction le sud, Nous avons marché toute la nuit et avons franchi la Loire à Chatillon sur Loire sur les coups de dix heures du matin.
J'ai eu tout de même de la chance par le fait que je ne transpirais pas des pieds et que j'avais perçu une paire de chaussures qui m'allait comme un gant. D'autres moins chanceux avaient les pieds en sang.
Nous avons fait une pose à Chatillon sur Loire. Au milieu de la nuit suivante, le pont sautait. Le lendemain matin, on apprend qu'on allait reprendre la route mais qu'il fallait qu'on laisse tout notre barda sur place.
A la sortie de Bourges, on a trouvé une petite camionnette abandonnée au bord de la route. On a réussi à la remettre en marche et elle nous a servi de moyen de locomotion.
A Saint Léonard de Noblat, près de limoges, nous sommes tombés sur une compagnie qui était également en déroute. Nous avons mangé avec ces soldats et avons pris place à bord de bus qui avaient dû être réquisitionnés sur Paris.
Nous sommes arrivés à Salviac dans le Lot où nous avons séjournés une quinzaine de jours. Ca faisait pratiquement douze jours que nous n'avions pas enlevé nos chaussures.
A Salviac, comme nous n'avions rien à faire, on se promenait dans les environs. Avec des copains, nous avons découverts une petite grange isolée au bord d'un chemin. Comme elle était pleine de foin, elle nous a servi de dortoir, c'était toujours plus confortable que de dormir sur le sol, à l'école où nous étions cantonnés.
Ensuite nous sommes restés trois semaines environ à Gaumier, un petit village des environs mais situé en Dordogne. On nous a donné des vieux mousquetons tout rouillés et des vieilles tuiles. Nous devions réduire les tuiles en poudre, mettre cette poudre sur des chiffons, et frotter les fusils pour les dérouiller.
Un jour on nous a informé que ceux qui le désiraient pouvaient partir pour aller aider des paysans. cette proposition m'a plu, ça allait me permettre de changer un peu de nourriture. Je suis donc revenu dans le Lot et me suis retrouvé dans une ferme de Bourbou où il ne restait plus que le grand père et son petit fils pour travailler.
Avec quelques autres nous avons participé aux moissons. Ensuite nous sommes redescendus sur Castelfranc, toujours dans le Lot, où nous avons séjourné une quinzaine de jours. Je me souviens qu'on faisait notre popote entre des cailloux. Un Parigot un peu bourgeois m'a confié que sa bonne ne lui avait jamais fais un pot-au-feu aussi bon que le mien.
Nous avons été démobilisés à côté de Cahors et avons été incorporés aussitôt dans les camps de jeunesse.
Nous avons été transférés à Meissex, en dessous de Bourg Lastic, au début du mois d'Octobre. Fin Octobre, nous avons changé de camps et sommes allés sur Veyrieres (15). Dans ce camp, nous étions cent par cabane et n'avions qu'un seul cubilot pour chauffer tout ça. Je me souviens avoir vu du givre sous ma paillasse.
Comme je m'étais retrouvé Chef cuistot ,il fallait que je fasse la soupe pour quatre cent personnes. Il me fallait un quartier arrière entier de vache par jour. J'en ai découpé des morceaux de viande! J'ai passé ainsi l'hivers 40/41 là, puis le printemps 41.
Un beau jour j'apprends par un courrier de mes parents que tout ceux de ma classe sont rentrés au pays. J'ai eu une décision difficile à prendre, d'autant que je venais de suivre une formation d'ouvrier forestier qui allait me permettre de gagner correctement ma vie.
Je pouvais gagner cinq cent francs par mois à l'époque si je continuais dans cette voie, mais la situation précaire de mes parents m'a fait prendre, un peu à contre cœur, la décision de revenir au Ménil. Dans le même temps, je suis contacté par Marcel Antoine, du Ménil, le fils à "Alix du Heuchot" ( Alix Antoine - Ndr). Il se trouvait dans la Creuse et voulait remonter dans les Vosges.
Je suis allé le retrouver et munis de sacs à dos, nous avons entamé la remontée vers les Vosges. Tout d'abord nous avons pris le train jusqu'à Lyon et de là, je ne sais plus comment, nous nous sommes débrouillés pour remonter sur le Jura.
Nous avons passés la ligne de démarcation au niveau de La Chaumusse, dans le Jura. Cette ligne était constitué par la ligne de chemin de fer, une fois de l'autre côté nous sommes restés le reste de la journée chez le passeur. Nous avons dormi de six heures du soir jusque dix heures du matin du fait que nous n'avions pas dormi la nuit précédente. Nous avons repris le train à Champagnole et sommes arrivés à Epinal courant Août.
J'ai repris les travaux agricoles à la ferme de mes parents, ce qui me permettait de ne pas être touché par le STO. Dans les années qui suivirent, je me souviens du passage répété du « Manchot », avec son vélo, qui venait faire le tour des fermes afin de faire le liste des choses ou aliments qui allaient être réquisitionnés.
Les hommes aussi étaient réquisitionnés pour faire des ouvrages pour le compte des Boches. Au Ménil, nous avons du faire des tranchées et des trous individuels depuis la Chapelle St Guérin jusqu'à Travexin en passant par La Revauche et le Gouau.
Parallèlement la résistance s'est développée alors j'alternais mes activités entre la résistance et l'armée d'occupation en tant que volontaire pour la première, et requis pour l'autre. Je me souviens avoir monté la garde avec « Pierre de Berthe » ( Pierre Chevrier – Ndr), de part et d'autre du hangar de « Louis Bitchon » ( Louis Valdenaire – Ndr) où se déroulaient des réunions secrètes de la résistance.
Un jour, un voisin qui connaissait mes occupations est venu me dire qu'il avait recueilli deux soldats. Je suis allé voir, il s'agissait de deux Hollandais qui s'était échappés.
Je les ai désarmés et les ai conduit dans un premier temps chez Louis Bitchon, lequel les a remis par la suite à Henri Philippe afin de les diriger vers le maquis du Peut-Haut.
Je n'ai pas vraiment eu de rapport avec le maquis, une fois seulement, à la demande du curé du village, je suis allé chercher un blessé du maquis de Bussang.
Les maquis du Peut-Haut et du Séchenat s'étaient regroupés à Bussang puis s'étaient disloqués. Une partie était revenue sur le Ménil, pensant rejoindre peut être celui de la Piquante Pierre. Ce groupe se trouvait maintenant sur les Huttes au Ménil. Il avait été canardé par erreur par l'armée de libération alors qu'il avançait sur Morbieux.
Le blessé avait eu les premiers soins par le Docteur Mathieu de Bussang, qui était le médecin du maquis. L'abbé Schmitt, le curé du Ménil avait été mis au courant. Dans la soirée, il avait demandé à Maria Chevrier de me prévenir afin que j'aille récupérer le blessé. J'ai perçu deux brassards de la Croix Rouge et un brancard.
Avec Mimille Claudel, nous avons pris la direction des Huttes. En chemin, nous avons croisé Fareintz, le blessé en question, lequel était soutenu par « Adri » ( Adrien Vaxelaire). Fareintz nous a demandé de ne pas nous occuper de lui puisqu'il pouvait encore marcher. Mais de monter au maquis où se trouvait d'autres blessés.
Nous avons pris la direction de la baraque des Italiens, mais la nuit tombait et il ne nous était plus possible d'avancer en sécurité. J'ai même du abandonner mon brancard au passage d'une patrouille Allemande.
Nous avons pris la décision de rebrousser chemin et nous sommes redescendus tout droit à travers la forêt pour retomber à la Golette. J'ai su plus tard que mon brancard avait été ré-utilisé deux ou trois jours plus tard pour transporter le Gendarme Minmeister, en poste à la Brigade du Thillot qui avait été blessé sur ce secteur en guidant les troupes alliées. J'avais donc bien fait de le laisser là.
( Le gendarme Minmeister Marcel, affecté à la Brigade du Thillot, résistant actif au sein du maquis de l'Ognon, engagé en tant que Sergent au 1er Régiment de Tabors Marocains fut effectivement tué le 05 Novembre 1944 à la tête d'une patrouille , dans la forêt du Géant au Ménil . Il avait 24 ans – Ndr)
La première fois où nous avons été rassemblés pour aller faire les tranchées pour le compte des Allemands, nous avions passé la nuit précédente à la Kinsmuss à attendre un parachutage qui n'a jamais eu lieu. Je suis allé deux autres fois sur ce terrain de parachutage. La première fois le matériel a servi à ravitailler le maquis et la seconde fois la résistance. Mon Chef de centaine était René Pernel, mon Chef de trentaine Edmond Chevrier , dit Séraphin, mon Chef de sizaine était Martin Pesanti.
Henri Philippe venait de remplacer « Camile Odile » ( Camille Louis – Ndr), au pied levé à la tête de la Résistance locale parce que ce dernier avait été attrapé par les Boches. Dorénavant Chef de la résistance pour le Ménil Henri m'avait posté, avec un ou deux autres en avant poste, à la Vierge du Pré derrière lors d'un parachutage.
Ce dernier parachutage, peut être dévié par le vent est tombé dans la forêt à côté du terrain. Même si certains containers avaient touché le sol, il fallait souvent monter dans les arbres pour aller récupérer les parachutes. Nous n'avons pas chômé cette nuit là puisqu'il a fallu ensuite répartir et cacher les armes.
Quelques jours plus tard, avec « Mimile du Bressaud » ( Emile Claudel – Ndr), et Pierre de Berthe, nous sommes allés chercher des armes afin de disperser le stock.
Pierre de Berthe en a pris la moitié qu'il a dissimulé sous une grange chez lui et moi j'ai ramené le reste près de chez moi que j'ai caché également dans une grange. Comme ce secteur était très fréquenté par les patrouilles Allemandes, j'ai pensé que cette cache n'était pas bonne alors un soir, je suis allé déplacer cette cache. Près de cette grange, un gros sapin avait été déraciné, créant un trou providentiel.
J'ai bien emmitouflé ces armes pour qu'elles ne prennent pas l'humidité. Il y avait un fusil mitrailleur et neuf fusils anglais ; quatre mitraillettes, un sac de grenades et plusieurs sacs de balles. Nous avons fait quatre voyages à trois pour remonter ce stock d'armes et de munitions au pied de ce sapin.
Le lendemain matin je suis allé reboucher le trou. Ces armes sont restées là jusqu'à la fin de la guerre. Par la suite, nous les avons restitués à l'état parce que l'armée fut chargée de les collecter après la guerre.
Au petit matin, comme si de rien n'était on repartait travailler pour les Boches jusqu'à ce que les tirs de l'armée de libération, arrivée sur Ferdrupt, nous empêchent de continuer dans ces conditions. Les choses commençaient à aller mal, les Allemands savaient que les alliés avaient libérés les trois quart de la France et commençaient à devenir hargneux.
J'ai préféré passer les lignes plutôt que d'attendre qu'ils viennent me cueillir à la maison.
Je suis parti avec Henri Philippe, Joseph Lambert, un nommé Galmiche. Nous sommes montés tout droit dans la forêt au niveau de la Golette et nous avons pris la direction de Morbieux.
Henri Philippe est resté avec les militaires à Morbieux, probablement pour les renseigner sur les positions ennemies et moi je suis descendu sur Ferdrupt. Il y avait des camions qui faisaient la navette. J'avais bien fait de partir puisque juste après, des gars du Ménil ont été « ramassés » par les Boches et retenus prisonniers en Alsace.
Je suis allé à Rupt où je connaissais l'ancien Maire, Robert Parmentier. J'ai passé la nuit chez lui et ai trouvé refuge à Remiremont chez la marraine de ma future femme.
Comme j'avais mes deux frères qui étaient prisonniers à Nagold en Allemagne, je n'ai pas voulu m'engager, je suis descendu sur Epinal, toujours avec Joseph Lambert et nous avons fait des petits boulots, un coup à droite, un coup à gauche. Nous avons réussi à avoir un poste à la cuisine de l'hôpital Américain qui était basé à l'institution St Joseph. On servait les repas.
Je me souviens qu'un jour, les Américains faisaient la fête. Un repas amélioré était servi. Joseph Lambert s'était servi une cuisse de dinde qui dépassait les bords de son assiette ovale.
Je peux vous assurer que de ce côté là on a rattrapé le temps perdu. J'étais là lorsque, au mois de Mai 1945, le service des armées Françaises m'a appelé sous les drapeaux. Je suis allé garder les prisonniers Allemands qui étaient cantonnés à la caserne Schneider à Epinal. Cette affaire a duré jusqu'à la fin du mois d'Octobre où j'ai été démobilisé.
Ca commençait mal pour moi, d'abord, j'avais les Boches aux trousses et la gare de Sens ayant été bombardée, il a fallu, depuis Epinal, que je descende à Dijon, que je remonte à Paris, pour pouvoir arriver à Montargis le lundi soir.
Le mercredi nous sommes partis de Montargis, en rang par trois, percevoir nos tenues dans un cantonnement à la sortie de la ville. C'était des tenues de la guerre 14!. Allez savoir pourquoi, ils nous ont donné cinq chemises pour trois.
J'ai perçu un pantalon trop court, une veste sans bouton et la boite carrée qui servait déjà de cantine aux poilus de 14. C'est sûr qu'équipé comme ça, on n'allait pas gagner la guerre!
Le vendredi, nous apprenons que la 5ème compagnie, à laquelle j'appartiens désormais, va changer de cantonnement.
Un train avait bien été affrété pour nous trois jours avant, mais notre Colonel a jugé qu'il était préférable que nous partions à pied. En réalité, c'était la débâcle.
Nous voici donc partis à neuf heures du soir avec notre boite à paquetage, nos couvertures et tout le fourbi, direction le sud, Nous avons marché toute la nuit et avons franchi la Loire à Chatillon sur Loire sur les coups de dix heures du matin.
J'ai eu tout de même de la chance par le fait que je ne transpirais pas des pieds et que j'avais perçu une paire de chaussures qui m'allait comme un gant. D'autres moins chanceux avaient les pieds en sang.
Nous avons fait une pose à Chatillon sur Loire. Au milieu de la nuit suivante, le pont sautait. Le lendemain matin, on apprend qu'on allait reprendre la route mais qu'il fallait qu'on laisse tout notre barda sur place.
A la sortie de Bourges, on a trouvé une petite camionnette abandonnée au bord de la route. On a réussi à la remettre en marche et elle nous a servi de moyen de locomotion.
A Saint Léonard de Noblat, près de limoges, nous sommes tombés sur une compagnie qui était également en déroute. Nous avons mangé avec ces soldats et avons pris place à bord de bus qui avaient dû être réquisitionnés sur Paris.
Nous sommes arrivés à Salviac dans le Lot où nous avons séjournés une quinzaine de jours. Ca faisait pratiquement douze jours que nous n'avions pas enlevé nos chaussures.
A Salviac, comme nous n'avions rien à faire, on se promenait dans les environs. Avec des copains, nous avons découverts une petite grange isolée au bord d'un chemin. Comme elle était pleine de foin, elle nous a servi de dortoir, c'était toujours plus confortable que de dormir sur le sol, à l'école où nous étions cantonnés.
Ensuite nous sommes restés trois semaines environ à Gaumier, un petit village des environs mais situé en Dordogne. On nous a donné des vieux mousquetons tout rouillés et des vieilles tuiles. Nous devions réduire les tuiles en poudre, mettre cette poudre sur des chiffons, et frotter les fusils pour les dérouiller.
Un jour on nous a informé que ceux qui le désiraient pouvaient partir pour aller aider des paysans. cette proposition m'a plu, ça allait me permettre de changer un peu de nourriture. Je suis donc revenu dans le Lot et me suis retrouvé dans une ferme de Bourbou où il ne restait plus que le grand père et son petit fils pour travailler.
Avec quelques autres nous avons participé aux moissons. Ensuite nous sommes redescendus sur Castelfranc, toujours dans le Lot, où nous avons séjourné une quinzaine de jours. Je me souviens qu'on faisait notre popote entre des cailloux. Un Parigot un peu bourgeois m'a confié que sa bonne ne lui avait jamais fais un pot-au-feu aussi bon que le mien.
Nous avons été démobilisés à côté de Cahors et avons été incorporés aussitôt dans les camps de jeunesse.
Nous avons été transférés à Meissex, en dessous de Bourg Lastic, au début du mois d'Octobre. Fin Octobre, nous avons changé de camps et sommes allés sur Veyrieres (15). Dans ce camp, nous étions cent par cabane et n'avions qu'un seul cubilot pour chauffer tout ça. Je me souviens avoir vu du givre sous ma paillasse.
Comme je m'étais retrouvé Chef cuistot ,il fallait que je fasse la soupe pour quatre cent personnes. Il me fallait un quartier arrière entier de vache par jour. J'en ai découpé des morceaux de viande! J'ai passé ainsi l'hivers 40/41 là, puis le printemps 41.
Un beau jour j'apprends par un courrier de mes parents que tout ceux de ma classe sont rentrés au pays. J'ai eu une décision difficile à prendre, d'autant que je venais de suivre une formation d'ouvrier forestier qui allait me permettre de gagner correctement ma vie.
Je pouvais gagner cinq cent francs par mois à l'époque si je continuais dans cette voie, mais la situation précaire de mes parents m'a fait prendre, un peu à contre cœur, la décision de revenir au Ménil. Dans le même temps, je suis contacté par Marcel Antoine, du Ménil, le fils à "Alix du Heuchot" ( Alix Antoine - Ndr). Il se trouvait dans la Creuse et voulait remonter dans les Vosges.
Je suis allé le retrouver et munis de sacs à dos, nous avons entamé la remontée vers les Vosges. Tout d'abord nous avons pris le train jusqu'à Lyon et de là, je ne sais plus comment, nous nous sommes débrouillés pour remonter sur le Jura.
Nous avons passés la ligne de démarcation au niveau de La Chaumusse, dans le Jura. Cette ligne était constitué par la ligne de chemin de fer, une fois de l'autre côté nous sommes restés le reste de la journée chez le passeur. Nous avons dormi de six heures du soir jusque dix heures du matin du fait que nous n'avions pas dormi la nuit précédente. Nous avons repris le train à Champagnole et sommes arrivés à Epinal courant Août.
J'ai repris les travaux agricoles à la ferme de mes parents, ce qui me permettait de ne pas être touché par le STO. Dans les années qui suivirent, je me souviens du passage répété du « Manchot », avec son vélo, qui venait faire le tour des fermes afin de faire le liste des choses ou aliments qui allaient être réquisitionnés.
Les hommes aussi étaient réquisitionnés pour faire des ouvrages pour le compte des Boches. Au Ménil, nous avons du faire des tranchées et des trous individuels depuis la Chapelle St Guérin jusqu'à Travexin en passant par La Revauche et le Gouau.
Parallèlement la résistance s'est développée alors j'alternais mes activités entre la résistance et l'armée d'occupation en tant que volontaire pour la première, et requis pour l'autre. Je me souviens avoir monté la garde avec « Pierre de Berthe » ( Pierre Chevrier – Ndr), de part et d'autre du hangar de « Louis Bitchon » ( Louis Valdenaire – Ndr) où se déroulaient des réunions secrètes de la résistance.
Un jour, un voisin qui connaissait mes occupations est venu me dire qu'il avait recueilli deux soldats. Je suis allé voir, il s'agissait de deux Hollandais qui s'était échappés.
Je les ai désarmés et les ai conduit dans un premier temps chez Louis Bitchon, lequel les a remis par la suite à Henri Philippe afin de les diriger vers le maquis du Peut-Haut.
Je n'ai pas vraiment eu de rapport avec le maquis, une fois seulement, à la demande du curé du village, je suis allé chercher un blessé du maquis de Bussang.
Les maquis du Peut-Haut et du Séchenat s'étaient regroupés à Bussang puis s'étaient disloqués. Une partie était revenue sur le Ménil, pensant rejoindre peut être celui de la Piquante Pierre. Ce groupe se trouvait maintenant sur les Huttes au Ménil. Il avait été canardé par erreur par l'armée de libération alors qu'il avançait sur Morbieux.
Le blessé avait eu les premiers soins par le Docteur Mathieu de Bussang, qui était le médecin du maquis. L'abbé Schmitt, le curé du Ménil avait été mis au courant. Dans la soirée, il avait demandé à Maria Chevrier de me prévenir afin que j'aille récupérer le blessé. J'ai perçu deux brassards de la Croix Rouge et un brancard.
Avec Mimille Claudel, nous avons pris la direction des Huttes. En chemin, nous avons croisé Fareintz, le blessé en question, lequel était soutenu par « Adri » ( Adrien Vaxelaire). Fareintz nous a demandé de ne pas nous occuper de lui puisqu'il pouvait encore marcher. Mais de monter au maquis où se trouvait d'autres blessés.
Nous avons pris la direction de la baraque des Italiens, mais la nuit tombait et il ne nous était plus possible d'avancer en sécurité. J'ai même du abandonner mon brancard au passage d'une patrouille Allemande.
Nous avons pris la décision de rebrousser chemin et nous sommes redescendus tout droit à travers la forêt pour retomber à la Golette. J'ai su plus tard que mon brancard avait été ré-utilisé deux ou trois jours plus tard pour transporter le Gendarme Minmeister, en poste à la Brigade du Thillot qui avait été blessé sur ce secteur en guidant les troupes alliées. J'avais donc bien fait de le laisser là.
( Le gendarme Minmeister Marcel, affecté à la Brigade du Thillot, résistant actif au sein du maquis de l'Ognon, engagé en tant que Sergent au 1er Régiment de Tabors Marocains fut effectivement tué le 05 Novembre 1944 à la tête d'une patrouille , dans la forêt du Géant au Ménil . Il avait 24 ans – Ndr)
La première fois où nous avons été rassemblés pour aller faire les tranchées pour le compte des Allemands, nous avions passé la nuit précédente à la Kinsmuss à attendre un parachutage qui n'a jamais eu lieu. Je suis allé deux autres fois sur ce terrain de parachutage. La première fois le matériel a servi à ravitailler le maquis et la seconde fois la résistance. Mon Chef de centaine était René Pernel, mon Chef de trentaine Edmond Chevrier , dit Séraphin, mon Chef de sizaine était Martin Pesanti.
Henri Philippe venait de remplacer « Camile Odile » ( Camille Louis – Ndr), au pied levé à la tête de la Résistance locale parce que ce dernier avait été attrapé par les Boches. Dorénavant Chef de la résistance pour le Ménil Henri m'avait posté, avec un ou deux autres en avant poste, à la Vierge du Pré derrière lors d'un parachutage.
Ce dernier parachutage, peut être dévié par le vent est tombé dans la forêt à côté du terrain. Même si certains containers avaient touché le sol, il fallait souvent monter dans les arbres pour aller récupérer les parachutes. Nous n'avons pas chômé cette nuit là puisqu'il a fallu ensuite répartir et cacher les armes.
Quelques jours plus tard, avec « Mimile du Bressaud » ( Emile Claudel – Ndr), et Pierre de Berthe, nous sommes allés chercher des armes afin de disperser le stock.
Pierre de Berthe en a pris la moitié qu'il a dissimulé sous une grange chez lui et moi j'ai ramené le reste près de chez moi que j'ai caché également dans une grange. Comme ce secteur était très fréquenté par les patrouilles Allemandes, j'ai pensé que cette cache n'était pas bonne alors un soir, je suis allé déplacer cette cache. Près de cette grange, un gros sapin avait été déraciné, créant un trou providentiel.
J'ai bien emmitouflé ces armes pour qu'elles ne prennent pas l'humidité. Il y avait un fusil mitrailleur et neuf fusils anglais ; quatre mitraillettes, un sac de grenades et plusieurs sacs de balles. Nous avons fait quatre voyages à trois pour remonter ce stock d'armes et de munitions au pied de ce sapin.
Le lendemain matin je suis allé reboucher le trou. Ces armes sont restées là jusqu'à la fin de la guerre. Par la suite, nous les avons restitués à l'état parce que l'armée fut chargée de les collecter après la guerre.
Au petit matin, comme si de rien n'était on repartait travailler pour les Boches jusqu'à ce que les tirs de l'armée de libération, arrivée sur Ferdrupt, nous empêchent de continuer dans ces conditions. Les choses commençaient à aller mal, les Allemands savaient que les alliés avaient libérés les trois quart de la France et commençaient à devenir hargneux.
J'ai préféré passer les lignes plutôt que d'attendre qu'ils viennent me cueillir à la maison.
Je suis parti avec Henri Philippe, Joseph Lambert, un nommé Galmiche. Nous sommes montés tout droit dans la forêt au niveau de la Golette et nous avons pris la direction de Morbieux.
Henri Philippe est resté avec les militaires à Morbieux, probablement pour les renseigner sur les positions ennemies et moi je suis descendu sur Ferdrupt. Il y avait des camions qui faisaient la navette. J'avais bien fait de partir puisque juste après, des gars du Ménil ont été « ramassés » par les Boches et retenus prisonniers en Alsace.
Je suis allé à Rupt où je connaissais l'ancien Maire, Robert Parmentier. J'ai passé la nuit chez lui et ai trouvé refuge à Remiremont chez la marraine de ma future femme.
Comme j'avais mes deux frères qui étaient prisonniers à Nagold en Allemagne, je n'ai pas voulu m'engager, je suis descendu sur Epinal, toujours avec Joseph Lambert et nous avons fait des petits boulots, un coup à droite, un coup à gauche. Nous avons réussi à avoir un poste à la cuisine de l'hôpital Américain qui était basé à l'institution St Joseph. On servait les repas.
Je me souviens qu'un jour, les Américains faisaient la fête. Un repas amélioré était servi. Joseph Lambert s'était servi une cuisse de dinde qui dépassait les bords de son assiette ovale.
Je peux vous assurer que de ce côté là on a rattrapé le temps perdu. J'étais là lorsque, au mois de Mai 1945, le service des armées Françaises m'a appelé sous les drapeaux. Je suis allé garder les prisonniers Allemands qui étaient cantonnés à la caserne Schneider à Epinal. Cette affaire a duré jusqu'à la fin du mois d'Octobre où j'ai été démobilisé.
yves philippe- MODERATEUR
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